Page:Fleischmann - Le Roi de Rome et les femmes, 1910.djvu/368

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portrait au vitriol, c’est sous sa plume qu’on le place. À ceux qui, en ces temps-là, n’y regardaient point de trop près, cette virulence du prisonnier contre le geôlier ne pouvait-elle pas sembler vraisemblable ? La crédulité publique s’était laissée prendre bien des fois à des apocryphes plus mal combinés ! Ceux attribués au duc de Reichstadt demeurent aujourd’hui de curieux exemples de cette sorte de littérature de propagande politique et sentimentale. Ils paraissent d’une naïveté que nous n’avons nul besoin de signaler dans les deux lettres que nous publions ici en spécimen. Nous les devions rejeter dans la discussion faite des textes du temps, mais dans ces appendices, parmi ces pièces curieuses touchant à la Légende, elles peuvent prendre place. Voici d’abord une lettre qu’on fait écrire au Fils au dixième anniversaire de la mort de son père. C’est à sa cousine l’archiduchesse qu’il dit :


Mon cœur vous cherche... aux époques solennelles de la vie, je pense à Dieu et à vous. Aujourd’hui la place Vendôme est plus fière de ses aigles ; le laurier abaisse ses palmes attristées sous la main pieuse de quelques vétérans de l’Empire, et de nobles femmes viennent déposer sur ces trophées muets des couronnes d’immortelles.
C’est un beau sacerdoce que celui de la gloire ! Parmi toutes ces personnes que je crois voir s’empresser autour du gardien de la colonne, il en est sans doute qui ignorent dans quel lieu de l’Europe reposent les restes d’un père, d’un amant, d’un fils... La jeunesse et l’âge mûr de ceux qui ont vu la République et l’Empire n’ont été qu’un long combat. Que de sang versé ! Que d’héroïsme ! Non, il est impossible que de si grandes choses aient pour dernier résultat une misérable combinaison d’intérêt matériel ! Un grand peuple ne se résigne jamais à dorer de ses mains l’affront national.
{{taille|Je n’ai point de haine au cœur pour l’Autriche ; ce peuple est bon, mais on l’a tellement apprivoisé au joug, qu’il ignore jusqu’à son énergie. C’est la conséquence d’agglomérations fortuites dont le passé et les intérêts sont divers, et dont la politique essaie en vain de faire un tout homogène : en un mot, le cœur de cet empire est trop petit pour les membres... D’ailleurs, l’Autriche n’est que ma nourrice, la France est ma mère. Vous