Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/135

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— Oh non, Monsieur ! dit Raton. Je prie Dieu qu’il vous pardonne comme il a pardonné à ses bourreaux. Vous avez remis sous le joug Notre-Seigneur, et je suis trop heureuse d’avoir pris part à sa peine à la façon de Simon le Cyrénéen. À ce sujet M. de Royaumont nous explique par la figure LXII que la Croix de Jésus-Christ est toujours portée par deux, c’est-à-dire par le Divin Maître et par le chrétien qui souffre pour lui.

— Je suis touché, mon enfant, reprit Peixotte qui se sentit soulagé, de te voir partager une foi aussi vive, pour laquelle j’ai des penchants et des faiblesses. Mais le démon vient toujours à point pour me faire retomber dans le blasphème. Je finirais par en être vainqueur si quelqu’un joignait ses prières aux miennes. Prends donc encore ces cinq cents livres, mon enfant : tu feras dire des messes pour la tranquillité des pécheurs, et toi-même ne m’oublieras pas auprès de Dieu.

Raton prit les cinq cents livres en songeant que M. Poitou ne manquerait pas de réclamer une part qui vaudrait bien cet excédent, et elle en versa des pleurs sur la main de M. Peixotte qu’elle portait à ses lèvres. M. Peixotte prit ces pleurs pour de la reconnaissance, et il ne douta plus que Raton ne fût sincère. Il ne lui restait qu’une incertitude, celle d’être trahi par la