Aller au contenu

Page:Fleuriot - Mon sillon.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

142
mon sillon.

il m’approuvait très-éloquemment du regard. Oh ! je le sens, l’ancre a mordu là, et mon bateau ne sera plus ballotté par tous les vents contraires. Or, je puis bien dire à Paris la prière du pêcheur breton en mer :

« Mon Dieu, protégez ma barque, elle est si petite et la mer est si grande. »

Ce qu’il y a de certain, c’est que ma confiance, qui se mourait, renaît, comme le phénix, de ses cendres.

Je suis sorti du salon bleu le cœur au large, et je suis revenu chez moi sans me presser, admirant un ciel magnifiquement constellé ou suivant de l’œil, sur la surface terne et agitée de la Seine, les lignes brillantes des becs de gaz dont la réverbération allume dans l’eau une série de feux du plus magnifique effet. Il ne manquait à cette belle nuit que la majesté suprême du silence, mais ce formidable Paris a un défaut capital, il ne se tait jamais. Endormi ici, il veille là. La mort, cette grande silencieuse, a beau faucher, abattre, la vie machinale surabonde toujours. Ce qui frappe, ce qui fatigue, ce qui plaît, ce qui use dans Paris, c’est cela, la surabondance du mouvement, l’excès de vie. Quand,