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MONOGRAPHIE DE L’ANARCHISTE

dans vingt rues, en comptant Alfred place, Store Street et les deux Crescent.

Or on y distingue l’anarchiste français, espagnol ou italien à ceci : qu’il est presque immédiatement reconnu pour tel par son propriétaire. À peine est-il installé que ses voisins savent à quoi s’en tenir sur ses opinions et sur son histoire. Il a parlé. Il a tout raconté. Il a reçu la visite de Louise Michel, escortée de son chien et de sa nièce.

Au public-house, il catéchise le patron et la jolie petite fille blonde qui lui sert son bitter-ale. Il conspire à haute voix sans souci de la police et donne volontiers son adresse à tout venant. Il fait partie d’une ou deux sociétés de secours mutuels, chante dans leurs concerts et prêche dans leurs réunions.

À côté de lui, et le connaissant à peine, l’anarchiste du Nord vit silencieux et reclus. Celui-ci fréquente peu les établissements publics ou s’y tient à l’écart des militants tapageurs. Son propriétaire le prend pour un artisan modèle ou pour un paisible teneur de livres, sans se douter que ce locataire irréprochable emploie le repos du dimanche à essayer de fabriquer de la nitro-glycérine dans le seau de son cabinet de toilette. Ce septentrional ne fera peut-être pas d’adhérents, mais il préparera quelque jour un « coup sérieux ». Voulez-vous vous expliquer les longs mutismes, la froide résolution, la discrétion de Ravachol avant l’action ? Rappelez-vous qu’il se nommait Kœnigstein et qu’il avait du sang allemand dans les veines. Chez lui, l’exubérance du latin se