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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/356

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Dona Carmen, dont la passion pour les spectacles de toute nature est telle, qu’elle serait de force à aller, dans la même soirée, voir crucifier Jésus-Christ, représentation qu’on donne dans les églises d’Amérique pendant la semaine sainte, ensuite au théâtre admirer les danseurs de corde, puis aux combats de coqs ; ma chère cousine, tout en regardant dédaigneusement la populace qui se trouvait réunie sur la place de la Mercede, n’en avait pas moins pris sa bonne part du plaisir qu’éprouvait la multitude à voir manœuvrer la Vierge et ses soldats, mais elle se garda bien de nous l’avouer. Elle critiqua hautement cette bêtise, et fut, au fond, très contrariée que j’en eusse été témoin.

Les Français qui étaient avec nous à la représentation du Mystère se contentèrent de s’en moquer, d’en rire et n’en furent autrement affectés. Autant que je pus le voir, je fus la seule qui revins tout attristée de ce spectacle. Je me suis toujours vivement intéressée au bien-être des sociétés au milieu desquelles le destin m’a transportée, et je ressentais un vrai chagrin de l’abrutissement de ce peuple. Son bonheur, me disais-je, n’est jamais entré pour rien dans les combinaisons des gouvernants. S’ils