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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/368

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Je me promenais de long en large dans la chambre, évitant de rencontrer ses regards, souffrant mille morts de la douleur atroce que je causais à un homme que j’aimais de la plus tendre affection. Enfin il me dit avec l’accent d’une profonde indignation :

— Ainsi, lorsque je veux vous épouser sans fortune, dans la position où vous êtes, avec un enfant ; lorsque je suis prêt à vous sacrifier tout, tout…, vous mettez des conditions à votre amour. Et quelles conditions !…

— Monsieur Chabrié, est-ce que vous hésiteriez ?

— Hésiter, mademoiselle ; oh ! non ; tant que ce vieux cœur battra dans ma poitrine, je n’hésiterai jamais entre l’honneur et l’infamie.

— Où donc est l’infamie de ma proposition, lorsque je vous demande, monsieur, de m’aider à me faire rendre ce qui m’appartient en toute équité ?

— Je ne suis pas juge de vos droits. Vous voulez faire de moi un instrument, me faire servir à vos projets d’ambition ; c’est ainsi que vous répondez à mon amour…

— Si vous m’aimiez, monsieur Chabrié, vous ne balanceriez pas un instant à me rendre le ser-