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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/374

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« A mademoiselle Flora de Tristan, à Aréquipa.


Islay, 24 octobre 1833.

« Je ne saurais vous dire, mademoiselle, combien votre lettre m’a fait de peine. J’avais, d’après des rapports infidèles, cru que votre réception avait été plus favorable, que votre position, votre avenir étaient plus riants ; j’avais même été assez loin, en idée, pour anticiper déjà votre retour en Europe, lorsque le courrier est arrivé et a dissipé une des dernières illusions que je m’étais faites ; car, vous ne l’ignorez pas, mademoiselle, ce n’est pas impunément que l’on a partagé avec vous les beaux jours des tropiques et les sombres nuits du cap Horn, ce voyage, tout triste, tout ennuyeux qu’il a été, a encore vu sous plus d’un aspect, son beau côté, et, pour moi, les moments de bonne humeur que je vous ai surpris, ainsi que vos aimables conversations, lorsque les nausées du mal de mer étaient passées, m’ont laissé aussi un grand vide ; et rarement je vais dans votre chambre, que j’occupe maintenant, sans évoquer l’ombre de celle qui l’a habitée. Me rappelant de vous, je ne puis séparer du souvenir la crainte du présent, et alors je suis fâché, très fâché de vous avoir connue, puisque mes souhaits sont stériles, et que, tout en désirant votre bonheur, je ne puis même l’entrevoir. J’étais léger, disiez-vous, lorsque je jugeais qu’il n’y avait pas de vertu sur cette terre inhospitalière ; cependant le jugement que je portais était fondé.   .   .   .   .   .   .

« Vous aviez pensé sagement qu’on pourrait chercher à