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femmes occupées à laver, d’autres à coudre, toutes faisant un train effroyable par leurs cris, leurs chants et leur conversation.

Les ravanas sont les vivandières de l’Amérique du sud. Au Pérou, chaque soldat emmène avec lui autant de femmes qu’il veut ; il y en a qui en ont jusqu’à quatre. Elles forment une troupe considérable, précèdent l’armée de plusieurs heures pour avoir le temps de lui procurer des vivres, de les faire cuire et de tout préparer au gîte qu’elle doit occuper. Le départ de l’avant-garde femelle fait de suite juger de tout ce que ces malheureuses ont à souffrir, de la vie de dangers et de fatigues qu’elles mènent. Les ravanas sont armées ; elles chargent sur des mules les marmites, les tentes, tout le bagage enfin ; elles traînent à leur suite une multitude d’enfants de tout âge, font partir leurs mules au grand trot, les suivent en courant, gravissent ainsi les hautes montagnes couvertes de neige, traversent les fleuves à la nage, portant un et quelquefois deux enfants sur leur dos. Lorsqu’elles arrivent au lieu qu’on leur a assigné, elles s’occupent d’abord de choisir le meilleur emplacement pour camper ; ensuite elles déchargent les mules, dressent des tentes, allaitent et