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jeunes officiers dont le courage, la fermeté et le talent le tirèrent d’embarras. MM. Torres, Montoya, Quirroga, que leurs qualités rendaient dignes de servir une meilleure cause, s’emparèrent du commandement, ranimèrent le moral du soldat, apaisèrent les insolents murmures des ravanas ; et, donnant l’exemple de la résignation que tout militaire doit avoir dans de pareils moments, ils coupèrent, avec leurs sabres, des raquettes qui croissent en abondance sur la montagne, en mâchèrent les premiers, afin d’étancher leur soif, en distribuèrent aux soldats, aux ravanas, qui, tous, les reçurent avec soumission et s’en alimentèrent sans oser répliquer. Mais ces officiers sentaient bien que ce moyen ne pouvait calmer l’irritation de leurs hommes que pour quelques heures ; et ils se décidèrent à risquer le combat, préférant mourir par le fer que par la soif. Le lieutenant Quirroga demanda aux soldats s’ils voulaient se retirer sans combattre, fuir honteusement en présence de l’ennemi et s’exposer, en retournant à Cangallo, à périr de faim et de soif, à mourir dans le désert, de la mort d’un mulet, ou s’ils n’aimaient pas mieux faire sentir la puissance de leurs bras à cette