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ma tante. — Ce n’était pas de cette manière qu’il fallait vous y prendre, me disaient-ils, pour obtenir quelque chose d’eux. Puisque vous ne vouliez pas plaider, il fallait user de douceur, faire la cour à votre oncle, flatter Joaquina, attendre avec patience et saisir le moment où don Pio aurait pu faire parade, aux yeux du monde, de sa grande générosité envers vous. Au lieu de cela, vous les traitez du haut de votre supériorité, vous les blessez dans les endroits les plus sensibles, vous exposez aux yeux de tous leur avarice : comment voulez-vous qu’ils ne vous prennent pas en haine, haine qui sera d’autant plus dangereuse qu’elle sera cachée ? Ils avaient raison : une autre, à ma place, aurait pu avoir cent mille francs de mon oncle et la gracieuse protection de Joaquina ; mais il n’aurait pas fallu que cette autre eut la fierté, la franchise de mon caractère, et éprouvât, comme moi, un invincible dégoût pour le métier de flatteur. Si mon oncle avait consenti, avec noblesse, à me donner cent mille francs, ainsi satisfaite, j’aurais eu pour lui, en acceptant ce don de sa générosité, une vive reconnaissance ; mais lorsque, pour obtenir cette somme, je me voyais forcée de briser