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rendez-vous des baigneurs : il est à une courte distance de la mer, a de beaux arbres, de la verdure et de l’eau (c’est cette même eau qui vient former les égouts de Chorrillos) ; mais ce dernier village, perché sur le haut d’un rocher noir et aride, est privé de tous les avantages que présente El Baranco. Rien de plus triste et de plus sale que cet amas de huttes : pas un arbre, pas un brin d’herbe ne viennent récréer la vue, et l’eau est au bas du rocher. Les maisons sont construites en bois, plusieurs ne sont pas carrelées ; il y en a en bambou, qui n’ont d’autres ouvertures que les portes : toutes sont fort incommodes et meublées de vieilleries. Chorrillos manque de tout pour la nourriture, et son marché n’est pas suffisamment approvisionné ; aussi tout est cher et mauvais. On ne peut sortir sans enfoncer jusqu’à mi-jambes dans un sable noir ; les souliers, les bas, le tour de la robe sont abîmés après une pareille promenade. Le vent de mer souffle ce sable noir dans les yeux, tandis qu’on est aveuglé par la réverbération du soleil ; en un mot, c’est le lieu le plus détestable que j’aie encore rencontré, et cependant ce village s’est tellement accru depuis cinq ans, qu’il y avait alors 800 maisons.