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convenu entre nous que je serais la confidente des joies aussi bien que des tribulations, je veux rire à mon tour.

— Sachez, donc, chère amie, que, ce matin, notre aimable et prévoyant général m’a fait dire qu’il voulait que j’allasse ranger ce qu’il appelle son grand magasin, c’est tout bonnement la petite chapelle qui tient à la prison. Après déjeuner, j’ai pris deux hommes avec moi, et je suis allé à ce sanctuaire dont, jusqu’alors, on m’avait interdit l’entrée. Ce n’était pas sans raison qu’ils m’en faisaient mystère : devinez, chère enfant, ce que j’ai trouvé dans ce magasin ?

— Mais, que sais-je, des sabres, des fusils ?

— Oui, des sabres, mais vous n’en devineriez pas le nombre…  ; il y a dans le magasin deux mille huit cents sabres qu’ils viennent d’acheter, quand je défie Nieto de réunir six à huit cents hommes sous ses ordres ! Il s’y trouve dix-huit cents fusils, et quels fusils ! Ah ! il n’y a pas de danger, ils ne tueront pas leurs frères avec ces fusils fabriqués à Birmingham ; ils ne coûtent ici que 22 francs ; certes, voilà du beau poli anglais à bon marché ! mais un innocent échalas serait plus redoutable que dix de ces