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RICHE OU AIMÉE ?

qu’on avait, sans doute, chez elle, à l’égard des « parentes pauvres ».

Mme de Lacourselle, ou bien ne saisissait pas ces nuances, ou bien avait la tactique de les laisser passer inaperçues ; il n’en était pas de même de Gisèle, et André remarqua qu’un éclair s’alluma dans ses yeux noirs, lorsque Suzanne de Vauteur vint, par ordre, la saluer d’un petit coup de tête très bref.

— Bonjour, petite, lui répondit-elle d’un ton narquois, insistant sur l’épithète ; comme vous voilà grande depuis quelques mois !

— Aussi à Paris on ne m’appelle plus « petite » ; répliqua d’un air très froissé Mlle de Vauteur.

— C’est qu’on ne regarde qu’à votre taille, reprit vivement Gisèle.

La petite fille ne saisit pas l’allusion, mais André, qui s’était rapproché de Gisèle, lui dit à demi-voix :

— Vous perdez vos peines, elle ne vous a pas comprise.

— Qu’importe ! cela soulage parfois de déverser sa bile ; cette « petite » m’agace avec ses airs importants.

— Et moi, donc !

— Bonne maman, disait à ce même moment le jeune Pierre d’Azas, le potache de dix ans, j’ai amené mon « vélo », et je vais épater les bonnes gens d’ici par le train dont je cours ; Terront ne va pas plus vite, vous savez ?

— Ah ! fit Mme de Vauteur souriante, et c’est cela qu’on t’apprend au collège, mon enfant ?

— Ah ! non, par exemple, on m’enseigne des choses bassinantes qui ne me serviront de rien dans la vie, tandis que le « vélo », c’est le cheval de l’avenir !

Et, sans s’apercevoir que sa grand’mère haussait les épaules, le gamin fit une pirouette et disparut, tandis qu’André murmurait à l’oreille de Gisèle :

— Celui-là est complet.

— N’est-ce pas ? répondit la jeune fille, attendez, nous en verrons bien d’autres ; si vous n’avei. jamais observé de près les d’Azas, vous ne vous doutez pas des surprises qu’ils vous réservent.