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notice

Fontaine, et il est à présumer qu’il la conservera longtemps.

Cette place est belle sans doute, et on me dispenserait volontiers d’en relever l’éclat par des considérations qui peuvent offrir au premier abord quelque apparence de paradoxe. Il n’y a cependant rien de plus vrai que ce qui me reste à dire : c’est que, sous tous les rapports essentiels, les Fables de Florian fournissent une lecture mieux appropriée à l’éducation des jeunes gens que les Fables de La Fontaine.

C’est par une erreur très commune, à la vérité, mais qui n’en est pas moins très grossière, qu’on a regardé les Fables de La Fontaine comme un livre propre aux enfants. Sans adopter aveuglément les critiques souvent injustes de Rousseau, on est obligé de convenir avec lui que ces délicieuses compositions sont généralement fort au-dessus de l’intelligence du premier âge. Notre admirable conteur est autre chose encore qu’un conteur ; c’est un admirable observateur qui a pénétré tous les secrets du cœur humain, un philosophe qui a lu à livre ouvert dans les mystères de la nature, un politique d’instinct et de génie qui n’ignore rien de la science des cours. Il est naïf et simple, parce que tel est le caractère du genre dans lequel il écrit, mais sa naïveté est satirique et sa simplicité moqueuse. Il raisonne sérieusement, même quand on croirait qu’il badine, et il n’est jamais plus près d’une vérité hardie que lorsqu’il paraît se jouer à la superficie d’un mensonge sans conséquence. Les Fables de La Fontaine sont un livre d’homme, et je n’entends pas même par là que les Fables de La Fontaine soient à la portée de tous les hommes.

C’est avoir profité que d’avoir su s’y plaire.