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réduite aux épisodes essentiels, et contée, s’il se peut, naïvement. On se préparera à l’aimer en lisant Oldenberg qui la retrace avec charme. Mais le roman des conteurs et des imagiers de l’Inde ancienne, surtout dans le nord, est beaucoup plus riche. Les uns et les autres ont inventé avec profusion.


III. — LA PHILOSOPHIE DU RENONCEMENT ET SON AVENIR ESTHÉTIQUE.


Il semble d’abord que la doctrine bouddhique soit exclusive de toute esthétique et même de toute représentation figurée. Que dit-elle en effet ? Il faut renoncer et s’abstenir. La vie est une douleur, et, pour abolir la douleur, il faut chasser de nous tout ce qui peut nous rattacher à la vie. La stabilité dans une demeure, le luxe et les commodités de l’existence, les affections familiales sont autant de fardeaux qui nous enfoncent et qui nous immobilisent dans la douleur. Le devoir du sage est d’errer, d’être pauvre, d’être chaste et de se taire.

Mais cette doctrine n’est pas née en un point quelconque de l’espace. Elle s’est répandue sur une terre ardente et prolifique, où le pullulement de la vie, malgré les misères du monde, malgré la monotonie des longs jours sans avenir, chez un peuple indifférent à la liberté, est une magnifique force expansive qui s’empare de tout. Elle a été prêchée à des êtres richement imaginatifs et qui se débattaient déjà dans un