Page:Focillon - Vie des formes, 1934.djvu/38

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taine complaisance pour la mystique des nombres. Mais il est incontestable que les masses architecturales sont rigoureusement établies selon le rapport des parties entre elles et de ces parties au tout. Au surplus un édifice est rarement masse unique. Il est le plus souvent combinaison de masses secondaires et de masses principales, et ce traitement de l’espace atteint dans l’art du Moyen Âge à un degré de puissance, de variété et même de virtuosité extraordinaire. L’Auvergne romane en offre des exemples remarquables et bien connus dans la composition de ses chevets où s’étagent progressivement les volumes, depuis les chapelles absidales jusqu’à la flèche de la lanterne, en passant par la toiture des chapelles, celle du déambulatoire, celle du chœur et le massif rectangulaire sur lequel pose le clocher. De même la composition des façades, depuis l’abside occidentale des grandes abbatiales carolingiennes jusqu’au type harmonique des églises normandes, avec le stade intermédiaire des narthex très développés, conçus comme de vastes églises. Il apparaît que la façade n’est pas mur, simple élévation, mais combinaison de masses volumineuses, profondes, agencées avec complexité. Enfin le rapport des nefs et des bas-côtés, simples ou doubles, des nefs et du transept, plus ou moins en saillie, dans l’architecture gothique de la seconde moitié du xiie siècle, la pyramide plus ou moins aiguë dans laquelle ces masses s’inscrivent, la continuité ou la discontinuité des profils posent des problèmes qui excèdent la géométrie plane et qui ne sont peut-être pas fondés non plus uniquement sur le jeu des proportions.

C’est que, si les proportions sont nécessaires à la définition de la masse, elles n’y suffisent pas. Une masse accepte plus ou moins d’épisodes, plus ou moins de percées, plus ou moins d’effets. Réduite à la plus sobre économie murale, elle acquiert une stabilité considérable, elle pèse fortement sur son socle, elle se présente à nos yeux comme un solide compact. La lumière la possède avec unité, et comme d’un seul coup. Au contraire, la