faire mille affaires. Or le soleil, pour se coucher, se laissant devaler du haut du ciel, la nuit commençoit à apporter ses tenebres sur la terre, et Gose endormie ronfle à bouche ouverte.
esja la corpulence de Balde commençoit fort à s’accroistre,
et ses membres s’estendoyent grandement,
tellement qu’il avoit cinq brasses de haut, les espaules
larges, et la poitrine relevée, le foye du corps serré, les
jambes nerveuses, le pied petit, les reins fermes, et estoit
droit au marcher ; le pas si legier, qu’il n’eust pas esté
bien aisé d’en remarquer le vestige sur du sablon. Il
avoit l’œil vif, et tousjours prompt à regarder çà et là,
brillant comme fait le soleil quand il donne sur un miroir.
Il n’avoit encores gueres de barbe, et n’en avoit le
poil rude ; mais seulement avoit une moustache sur la
levre de dessus d’environ trente petits poils ressemblant
à de la laine, ayant ceste levre un peu plus eslevée que
celle de dessoubs, qui le denotoit devoir estre quelque
jour plus sage. Or, parce qu’il n’avoit point en cet aage
aucun maistre pour l’instruire, il n’avoit pour compagnons
que des ruffiens, des bravaches, des coureurs, des guetteurs
de chemins, et certains bons vautneans, qu’on appelloit
fendeurs de nazeaux, et machefers. Avec telles
gens Balde vivoit plus aise qu’un pourceau à l’auge, l’aage
transportant ceste jeunesse hors les bornes de raison,
comme un poulain qui n’a encore gousté en l’estable que
c’est d’un licol. Car ces poulains-cy desbauchez, pendant