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Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/363

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de toutes douleurs, le Phlegethon des peines, le fleuve et la mer de pleurs ! Ha, Dieux ! quel personnage vous avez voulu perdre ! Ha, quel, ô Destin, vous avez tué ! Ha, douleur ! ha, douleur ! ha, quel ennuy ! » Et là-dessus Balde, ce faisant, avoit mis contre son estomac la pointe de son espée. Mais Cingar, le prenant par les deux espaules, luy arrache soudain l’espée d’entre les mains, et cependant iceluy tombe par terre, luy venant au visage une soudaine couleur pasle, ressemblant à la mort : mais, s’endormant, son esprit print quelque repos.


LIVRE DIX-HUITIÈME.


L’esprit de Balde, abbreuvé de la douce liqueur endormante, s’estoit retiré là à part, où son bel astre clair et radieux l’avoit tiré, s’estant joinct au beau Juppiter et à la benigne Venus, et l’avoit posé au jardin secret de la Destinée. En ce lieu il apprint, entre autres choses, combien estoit un travail inutile de s’attacher et appuyer à une colonne branlante, qui est à dire, de fonder son espérance sur choses caducques et transitoires. Pendant qu’il estoit ainsi endormi, il avoit sa teste au giron de Cingar soubs un chesne, l’un veillant, l’autre dormant. Cependant le Centaure, ayant bonne volonté d’exposer sa vie à tous les perils pour l’amour de Cingar, chemine doucement et le plus quoyement qu’il peut, pas à pas, vers la demeure de Pandrague, de peur qu’elle entende sa venuë, et qu’elle s’enfuie pour éviter la mort qu’on luy preparoit à cause du decez de Leonard. Comme nous voyons quelquefois un chat alonger tout le corps, et se trainer