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ŒUVRES DE FONTANES

Se livre à des transports aussi doux que les miens.
Ah ! si nous rapprochions nos hardis entretiens !
Cherche-t-il quelquefois ce globe de la terre,
Qui, dans l’espace immense, en un point se resserre ?
A-t-il pu soupçonner qu’en ce séjour de pleurs
Rampe un être immortel qu’ont flétri les douleurs ?
Habitants inconnus de ces sphères lointaines,
Sentez-vous nos besoins, nos plaisirs et nos peines ?
Connaissez-vous nos arts ? Dieu vous a-t-il donné
Des sens moins imparfaits, un destin moins borné ?
Royaumes étoiles, célestes colonies,
Peut-être enfermez-vous ces esprits, ces génies,
Qui, par tous les degrés de l’échelle du ciel,
Montaient, suivant Platon, jusqu’au trône éternel.
Si, pourtant, loin de nous, en ce vaste empirée,
Un autre genre humain peuple une autre contrée,
Hommes, n’imitez pas vos frères malheureux !
En apprenant leur sort, vous gémiriez sur eux ;
Vos larmes mouilleraient nos fastes lamentables.
Tous les siècles en deuil, l’un à l’autre semblables,
Courent sans s’arrêter, foulant de toutes parts,
Les trônes, les autels, les empires épars ;
Et sans cesse frappés de plaintes importunes,
Passent, en me contant nos longues infortunes.
Vous hommes, nos égaux, puissiez~vous être, hélas !
Plus sages, plus unis, plus heureux qu’ici-bas !
 Oh ! si j’osais plus loin prolonger ma carrière,
Je chanterais encor cette cause première,
Ce grand Être inconnu dont l’âme fait mouvoir
Les millions de cieux où s’est peint son pouvoir,