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ŒUVRES DE FONTANES.

Fait monter dans ces lieux un maigre filet d’eau
Qui serpente à regret sous le nom de ruisseau.
Tous les jours la Naïade, annonçant sa détresse,
De la pompe trop lente excitait la paresse.

 Enfin, le parc s’achève : on y trouve à la fois,
Et des temples d’Athène, et des kiosks chinois,
Un obélisque, un pont, des tours demi-brisées,
Des marbres, des tombeaux, vil rebut des musées ;
Et c’est en vain que l’œil, en ce parc fastueux,
Cherche une plante utile, un rameau fructueux.

 Cependant, l’insensé payait cher sa folie ;
Souvent des créanciers la requête impolie
Vînt troubler les plaisirs qu’il goûte en ces beaux lieux
Un jour qu’il admirait d’un air silencieux
Une vieille ruine avec grâce ébauchée,
Des femmes, des valets, la troupe effarouchée
Accourt, et pousse au loin de lamentables voix ;
D’insensihles huissiers, des sergents discourtois,
Armés d’une sentence, ont enfoncé la porte ;
Mondor est enlevé par la noire cohorte.
Nul ne plaignit son sort : on vendit son château,
Et, plus sensé que lui, l’habitant du hameau
Sur les débris des tours, des temples, des statues.
Déjà poussant la bêche, a semé des laitues.

 Ces travers de l’orgueil sont communs aujourd’hui.
La mode entraine tout, et le bon sens a fui.
Il faut à Turcaret d’élégants paysages,