Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/540

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
413
POÉSIES DIVERSES.

Quand il nait, tout l’accueille ; on aime son aurore.
Rappelle-toi ces jours où, commençant d’éclore,
Ta muse, qui brillait des plus fraiches couleurs,
Orna d’attirails nouveaux la Déesse des fleurs,
Alors que ton crayon, pur et brillant comme elles,
Accroissait du printemps les âmes immortelles[1].
Ô jours d’enchantements ! L’espérance, à tes yeux,
Ouvrait dans un ciel pur ces lointains radieux,
D’où la Gloire, au travers de cent miroirs magiques.
De son temple élevé fait briller les portiques.
La course était immense et ne t’effrayait pas.
Quelle langueur oisive a suspendu tes pas ?
Tu m’as trop imité : les plaisirs, la mollesse,
Dans un piège enchanteur ont surpris la faiblesse.
La gloire en vain promet des honneurs éclatants ;
Un souris de l’amour est plus doux à vingt ans ;
Mais à trente ans la gloire est plus douce peut-être.

 Je l’éprouve aujourd’hui ; j’ai trop vu disparaître
Dans quelques vains plaisirs, aussitôt échappés,
Des jours que le travail aurait mieux occupés.
Oh ! dans ces courts moments consacrés à l’étude,
Combien je chérissais ma docte solitude !
J’y bornais tous mes vœux, et, charmant mon loisir,
Chaque heure fugitive y laissait un plaisir.
Là, d’un air recueilli, mais sans être farouche,
Le Silence pensif, et le doigt sur la bouche,

  1. Fragments d’un poëme sur les paysages au printemps, que M. de Boisjolin avait publiés dans les recueils poétiques d’alors.