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M. DE FONTANES

une haute idée et une profonde reconnaissance. Ces noms, suivant lui (et il les présentait de la sorte à l’Empereur), étaient les garanties pour les familles, des indications manifestes de l’esprit social et religieux qu’il s’agisait de restaurer. À cette idée générale se joignait chez lui une inspiration de bonté et d’obligeance infinie pour les personnes, qui faisait dans le détail sa direction la plus ordinaire. Il penchait donc pour un conseil de l’Université très nombreux, et il aurait voulu tout d’abord en remplir les places avec des noms que désiraient d’autres services. Ce n’était pas l’avis de l’Empereur, toujours positif et spécial. Nous possédons là-dessus une précieuse note, qui rend les paroles mêmes prononcées par Napoléon dans une conversation avec M. de Fontanes à Saint-Cloud, le lundi 19 septembre 1808 : nous la reproduisons religieusement. Patience ! le côté particulier de la question va vite s’agrandir en même temps que se creuser sous son coup d’œil. Ce n’est pas seulement de l’administration en grand, c’est de la nature humaine éclairée par un Machiavel ou un La Rochefoucauld empereur.

« Dans une première formation, tous les esprits diffèrent. Mon opinion est qu’il ne faut pas nommer pendant plusieurs années les conseillers ordinaires.

« Il faut attendre que l’Université soit organisée comme elle doit l’être.

« Trente conseillers dans une première formation ne produiraient que désordre et qu’anarchie.

« On a voulu que cette tête opposât une force d’inertie et de résistance aux fausses doctrines et aux systèmes dangereux.

« Il ne faut donc composer successivement cette tête que d’hommes qui aient parcouru toute la carrière et qui soient au fait de beaucoup de choses.

« Les premiers choix sont en quelque sorte faits comme on prend des numéros à la loterie.

« Il ne faut pas s’exposer aux charmes du hasard. Dans les premières séances d’un conseil ainsi nommé, je le répète, tous