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ŒUVRES DE FONTANES.

vertu ; mais, au milieu de sa pauvreté, Mirabeau conservait tous les besoins du luxe et même d’une vanité puérile. Avec un tel contraste dans les habitudes et les moyens, l’homme le plus moral aurait succombé, et celui dont nous parlons n’avait pas des principes sévères : il prodiguait donc sa plume à tous les libraires et son talent à toutes les opinions dont il pouvait espérer de l’or et du bruit.

Il a écrit successivement contre la cour de Prusse, les ministres Necker et Calonne, la banque Saint-Charles, l’ordre de Cincinnatus et Beaumarchais.

L’auteur comique fut le plus sage dans toute cette affaire, il se contenta d’être riche et ne dit mot.

La postérité remarquera peut-être que les trois hommes qui ont le plus préparé et soutenu la révolution française, Calonne, Necker et Mirabeau, étaient ennemis. Il fut un temps où le second semblait réunir autour de lui toutes les espérances de la nation. C’en fut assez pour le désigner à la haine du dernier qui refusa au ministre genevois toute espèce de talent sous les rapports d’homme d’État. On s’est souvenu, en 1790, de ce jugement prononcé sur le directeur des finances à l’époque de sa gloire, et peu après le fameux Compte-Rendu.

Mirabeau se servit avec art de tous les esprits et de tous les travaux étrangers. M. Mauvillon, savant professeur de Brunswick, lui fournit les mémoires qui composent cette lourde compilation sur la monarchie prussienne, où le style est en général trop indigne du sujet et du génie de Frédéric. Champfort