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ÉLOGE DE WASHINGTON.

ont couvert les drapeaux de la victoire et l’habit de nos guerriers. Elles ne sont plus enfin ces pompes barbares, aussi contraires à la politique qu’à l’humanité, où l’on prodiguait l’insulte au malheur, le mépris à de grandes ruines, et la calomnie à des tombeaux. Toutes les pensées magnanimes, toutes les vérités utiles peuvent paraitre dans cette assemblée. Je loue avec honneur, devant des guerriers, un guerrier ferme dans les revers, modeste dans la victoire, et toujours humain dans l’une et l’autre fortune. Je loue, devant les ministres de la république française, un homme qui ne céda jamais aux mouvements de l’ambition, et qui se prodigua toujours aux besoins de sa patrie ; un homme, qui, par une destinée peu commune à ceux qui changent les empires, mourut en paix, et comme un simple particulier, dans sa terre natale, où il avait occupé le premier rang, et que ses mains avaient affranchie.

Quel Français, doué d’une imagination sensible, ne se rappelle avec transport le premier moment où la renommée nous annonça que la liberté relevait ses étendards chez les peuples de l’Amérique ? L’ancien monde, courbé sous le poids des vices et des calamités qui accablaient sa vieillesse, retrouva quelque enthousiasme, et tourna les yeux vers ces régions lointaines où semblait commencer une nouvelle époque pour le genre humain. Alors tous les vœux étaient pour la liberté ; et ces vœux mêmes se manifestèrent jusque dans les palais et sur les trônes. Les mers de l’Europe furent étonnées de porter des