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Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/290

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DISCOURS SUR LA HARPE.

d’autres auraient obtenu l’enthousiasme. Souvent les clameurs de ses ennemis parlèrent plus haut que le bruit de ses succès et de sa renommée : mais, à l’aspect de ce tombeau, tous les ennemis sont désarmés. Ici les haines finissent, et la vérité seule demeure.

Les talents de La Harpe ne seront plus enfin contestée ; tous les amis des lettres, quelles que soient leurs opinions, partagent maintenant notre deuil et nos regrets. Les circonstances où la mort le frappe rendent sa perte encore plus douloureuse ; il expire dans un âge où la pensée n’a rien perdu de sa vigueur, et lorsque son talent s’était agrandi dans un autre ordre d’idées qu’il devait aux spectacles sans exemple dont le monde est témoin depuis douze ans. Il laisse malheureusement imparfaits quelques ouvrages dont il attendait sa plus solide gloire, et qui seraient devenus ses premiers titres dans la postérité. Ses mains mourantes se sont détachées avec peine du dernier monument qu’il élevait ; ceux qui en connaissent quelques parties avouent que le talent poétique de l’auteur, grâce aux inspirations religieuses, n’eut jamais autant d’éclat, de force et d’originalité. On sait qu’il avait embrassé, avec toute l’énergie de son caractère, ces opinions utiles et consolantes, sur lesquelles repose tout le système social ; elles ont enrichi non-seulement ses pensées et son style de beautés nouvelles, mais elles ont encore adouci les souffrances de ses derniers jours. Le Dieu qu’adoraient Fénelon et Racine a consolé sur le lit de mort leur éloquent panégyriste et l’héritier de leurs leçons. Les