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ESSAI SUR L’HOMME.

La nature est un corps qui pour âme a Dieu même.


Cette magnifique description de Dieu rappelle les vers du sixième livre de l’Énéide, où Virgile expose la doctrine des stoïciens, qui admettaient une âme universelle :

Principio, cœlum ac terras, camposque liquentes,
Lucentemque globum lunæ, titaniaque astra,
Spiritus intùs alit ; totamque infusa per artus
Mens agitat molem, et magno se corpore miscet.
Indè homimum pecudumque genus, vitœque volantum,
Et quæ marmoreo fert monstra sub œquore pontus.


Cette faible imitation, que j’ai essayée pour ceux qui n’entendent point la langue de Virgile, leur donnera la facilité de comparer le poëte romain et le poëte anglais :

Dans les veines du monde une âme répandue,
Partout de ce grand corps agitant l’étendue,
Remplit les champs de l’air, et la terre et les eaux ;
Alimente l’éclat des célestes flambeaux ;
De son feu créateur à la fois elle anime
Les monstres bondissants sur les flots de l’abime,
Et les peuples ailés, et les troupeau nombreux,
Et l’homme enfin qui pense, et qui règne sur eux.


On trouve à peu près les mêmes idées dans un hymne qu’on attribue à l’ancien Orphée, et qui est adressé au dieu Pan, symbole de la nature. Voici une traduction assez littérale des premiers vers de cet hymne :

Ô Pan ! la terre et l’air, l’eau, la flamme féconde,
Dont l’éternel combat maintient l’ordre du monde,