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Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/90

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ESSAI SUR L’HOMME.


 Qui montre à l’animal les vertus de la plante ?
Comment sait-il prévoir l’hyade menaçante,
Et bâtir, en suivant d’infaillibles niveaux,
Des voûtes sous le sable et des ponts sur les eaux ?
Comment peut de nos murs l’agile tapissière
Aligner, sans Newton, sa toile régulière ?
Vois de Pair, tous les ans, les hôtes passagers
Fuir, pareils à Colomb, sous des cieux étrangers.
Qui fixe le départ des tribus assemblées ?
Qui forme et qui conduit les phalanges ailées ?

 Chaque être, au même but marchant d’un pas certain,
Sous des astres divers doit remplir son destin.
Ce but est d’être heureux ; mais, pour qu’on puisse l’être,
C’est des besoins communs que le bonheur doit naître.
Ainsi par l’intérêt, plus que par l’amitié,
On s’approche, on s’unit, l’homme à l’homme est lié.
L’intérêt mutuel fait tout l’ordre du monde.

 Sans jamais se lasser, la Nature féconde
À l’homme, aux habitants des forêts et des mers,
À ces mille tribus qui vivent dans les airs,
Partage également sa flamme créatrice ;
Elle veut que tout être en naissant se chérisse,
Et bientôt, plus heureux, se chérisse en autrui.
Le sexe le plus fort du plus faible est l’appui ;
Chacun d’eux se recherche, et s’attire et s’embrasse ;
Une troisième fois ils s’aiment dans leur race.
Tel sur ses nourrissons l’oiseau veille assidu ;
La mère aime à couver le berceau suspendu.