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ESSAI SUR L’HOMME.

Et vers le Créateur rappelant notre hommage
Sut en retracer l’ombre au défaut de l’image ;
Borna les droits du peuple et ceux des potentats ;
Apprit aux nations que des frêles États
Il ne faut ni raidir, ni relâcher les rênes ;
Que chacun doit s’aider ; que des lois souverains
L’harmonieux accord doit unir tous les rangs.

 Tel est l’ordre d’un monde où le peuple et les grands,
Où le faible et le fort, obligés d’être frères,
Joignent d’un même nœud leurs intérêts contraires ;
Où les divers pouvoirs, bien loin de se haïr,
Sont faits pour s’appuyer, et non pour d’envahir ;
Où le bonheur de tous naît de leur bienfaisance ;
Où plus on sert autrui, plus on a de puissance ;
Où vers un même but tous marchent à la fois,
L’ange et l’homme, et la brute, et l’esclave et les rois.

 Des Wighs et des Torys fuis la guerre obstinée !
La meilleure cité, c’est la mieux gouvernée.
Laisse nos faux docteurs disputer sur la foi ;
Sers Dieu, sers les humains : il n’est point d’autre loi.
Ce qui nuit est l’erreur : qu’importe un vain système ?
La charité suffit ; on a tout quand on aime.

 Aimons-nous : l’homme, hélas ! ne peut rien sans autrui ;
Tel que la faible vigne, il réclame un appui.
Comme à deux mouvements les planètes fidèles
Roulent sous le soleil en roulant autour d’elles,
L’homme suit deux penchants, amis quoique rivaux :