Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome I, 1825.djvu/340

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la promptitude du débit n’est pas pour les livres savans ; mais celui-là fut excepté. Il se vendit comme un ouvrage de galanterie ou de satire. Les éditions se suivaient les unes les autres presque d’année en année, sans compter un grand nombre d’éditions contrefaites, honorables et pernicieuses pour l’auteur ; C’était une science toute nouvelle qui paraissait au jour, et qui remuait la curiosité de tous les esprits.

Ce livre a été traduit en latin, en allemand, en anglais, en espagnol. Nous avons dit dans l’éloge de Tschirnhaus, que ce fut lui qui, par sa passion pour les sciences, le fit traduire en allemand à ses dépens. Le traducteur anglais, qui avait été écolier de Lemery à Paris, regrette dans sa préface de ne pas l’être encore, et traite la chimie de science qu’on devait presque entière à son maître. L’Espagnol, fondateur et président de la société royale de médecine établie à Séville, dit qu’en matière de chimie l’autorité du grand Lemery est plutôt unique que recommandable.

Quoiqu’il eût divulgué par son livre les secrets de la chimie, il s’en était réservé quelques uns ; par exemple, un émétique fort doux et plus sûr que l’ordinaire, et un opiat mésentérique avec lequel on dit qu’il a fait des cures surprenantes, et que pas un de ceux qui travaillaient sous lui n’a pu découvrir. Il s’était même contenté de rendre plusieurs opérations plus faciles sans révéler le dernier degré de facilité qu’il y connaissait ; et il ne doutait pas que de tant de richesses qu’il répandait libéralement dans le public, il ne lui fût permis d’en garder quelque petite partie pour son usage particulier.

En 1681, sa vie commença à être fort troublée à