Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/24

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Égypte, où les inondations du Nil, qui confondoient les bornes des champs, furent cause que chacun voulut inventer des mesures exactes pour reconnaître son champ d’avec celui de son voisin. Ainsi l’astronomie est fille de l’oisiveté, la géométrie est fille de l’intérêt, et s’il étoit question de la poésie, nous trouverions apparemment qu’elle est fille de l’amour.

Je suis bien aise, dit la Marquise, d’avoir appris cette généalogie des sciences, et je vois bien qu’il faut que je m’en tienne à l’astronomie. La géométrie, selon ce que vous me dites, demanderoit une âme plus intéressée que je ne l’ai, et la poésie en demanderoit une plus tendre, mais j’ai autant de loisir que l’astronomie en peut demander. Heureusement encore nous sommes à la campagne, et nous y menons quasi une vie pastorale ; tout cela convient à l’astronomie. Ne vous y trompez pas, Madame, repris-je. Ce n’est pas la vraie vie pastorale, que de parler des planètes, et des étoiles fixes. Voyez si c’est à cela que les gens de l’Astrée passent leur temps. Oh ! répondit-elle, cette sorte de bergerie-là est trop dangereuse. J’aime mieux celles de ces Chaldéens dont vous me parliez. Recommencez un peu, s’il vous plaît, à me parler Chaldéen. Quand on eut reconnu cette disposition des cieux que vous m’avez dite, de quoi fut-il question ? Il fut question,