Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/73

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juste. Mais, dit-elle, cela suffira-t-il pour nous faire abandonner les habitants de la lune ? Non pas tout à fait, Madame, répondis-je, nous ne nous déterminerons ni pour eux, ni contre eux. Je vous avoue ma faiblesse, répliqua-t-elle, je ne suis point capable d’une si parfaite indétermination, j’ai besoin de croire. Fixez-moi promptement à une opinion sur les habitants de la lune ; conservons-les, ou anéantissons-les pour jamais, et qu’il n’en soit plus parlé ; mais conservons-les plutôt, s’il se peut, j’ai pris pour eux une inclination que j’aurois de la peine à perdre. Je ne laisserai donc pas la lune déserte, repris-je, repeuplons-la pour vous faire plaisir. À la vérité, puisque l’apparence des taches de la lune ne change point, on ne peut pas croire qu’elle ait des nuages autour d’elle, qui ombragent tantôt une partie, tantôt une autre, mais ce n’est pas à dire qu’elle ne pousse point hors d’elle de vapeurs, ni d’exhalaisons. Nos nuages que nous voyons portés en l’air ne sont que des exhalaisons et des vapeurs, qui au sortir de la terre étoient séparées en trop petites parties pour pouvoir être vues, et qui ont rencontré un peu plus haut un froid qui les a resserrées, et rendues visibles par la réunion de leurs parties, après quoi ce sont de gros nuages qui flottent en l’air, où ils sont des corps étrangers, jusqu’à ce qu’ils retombent