Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/78

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sont attachées les étoiles fixes, n’a de lui-même aucune lumière, et par conséquent il devroit paroître noir ; mais on le voit au travers de l’air qui est bleu, et il paroît bleu. Si cela est, les rayons du soleil et des étoiles ne peuvent passer au travers de l’air sans se teindre un peu de sa couleur, et prendre autant de celle qui leur est naturelle. Mais quand même l’air ne seroit pas coloré de lui-même, il est certain qu’au travers d’un gros brouillard, la lumière d’un flambeau qu’on voit un peu de loin paraît toute rougeâtre, quoique ce ne soit pas sa vraie couleur ; et notre air n’est non plus qu’un gros brouillard qui nous doit altérer la vraie couleur, et du ciel, et du soleil, et des étoiles. Il n’appartiendroit qu’à la matière céleste de nous apporter la lumière et les couleurs dans toute leur pureté, et telles qu’elles sont. Ainsi, puisque l’air de la lune est d’une autre nature que notre air, ou il est teint en lui-même d’une autre couleur, ou du moins c’est un autre brouillard qui cause une autre altération aux couleurs des corps célestes. Enfin, à l’égard des gens de la Lune, cette lunette au travers de laquelle on voit tout est changée.

Cela me fait préférer notre séjour à celui de la lune, dit la Marquise, je ne saurois croire que l’assortiment des couleurs célestes y soit aussi beau qu’il