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les mystères de montréal

mâts Great-America est arrivé en cette ville venant des Indes, après avoir essuyé une rude traversée. Un matelot a été emporté à la mer. C’était un jeune Canadien-français qui venait de Saint-Denis de Richelieu. Il était grand, bien bâti et avait les cheveux noirs. Il menait une existence des plus singulières et on n’a jamais pu savoir son vrai nom. On dit qu’il avait laissé le Canada en mil huit cent trente-huit après avoir joué un rôle déloyal durant la guerre. »

Cette nouvelle était fausse et on comprend qui en était l’auteur. Elle se répandit sur les bords du Richelieu comme une traînée de poudre et causa une grande surprise.

Jeanne Duval ajouta foi à cette rumeur. Cela lui expliquait le long silence de son fiancé. Elle prenait le journal et le relisait, analysant chaque mot, se demandant dans quel sens on pouvait, on devait le prendre.

Dans de telles circonstances, à la campagne, ou va consulter le curé. Son opinion ouvre de nouveaux horizons à la pensée et son conseil est le bienvenu.

Non seulement le curé Demers était l’ami de la famille Duval mais il était pour elle un second père. Il l’avait consolée en mil huit cent trente-sept et trente huit, et s’intéressait à elle d’une manière spéciale. Il la visitait souvent et donnait des conseils à madame Duval pour gérer ses biens. L’amour qu’il portait aux orphelins eut pu leur faire oublier qu’ils étaient sans père, si un père pouvait s’oublier.