Aller au contenu

Page:Fortier - Les mystères de Montréal, 1893.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
150
les mystères de montréal

jeune fille était encore plus jolie qu’à l’époque où le traître avait commencé à l’aimer.

Charles Gagnon n’avait pas abandonné la partie. Il caressait toujours le même rêve doré, dont la seul pensée lui faisait supporter bien des petites misères et regarder comme rien le temps qui s’écoulerait avant d’en voir la réalisation.

Depuis que son rival passait pour mort, il n’allait presque plus avec Antoine Martel. Mais Antoine surveillait les mouvements de celui qui l’avait perdu et qui s’était flatté de le tenir en sa possession. Il avait résolu de le laisser entrer en amour avec Jeanne et de ne le dénoncer qu’à la dernière heure. Il savait que cette dénonciation le perdrait lui-même, mais il laisserait le pays, sort qui l’attendait un jour ou l’autre — puisque Paul Turcotte, qui n’était pas mort, ne passerait pas sa vie à l’étranger et que son retour amènerait la découverte du complot.

Les jeunesses de Saint-Denis avaient organisé un grand pique-nique auquel assistaient Jeanne Duval et Charles Gagnon.

Après le repas pris sur l’herbe on commença à danser. Jeanne ne dansait pas depuis la mort de son père : elle se promenait seule sur les bords de la rivière Richelieu.

Charles vint la trouver. Il brûlait depuis longtemps de déclarer son amour à la jeune fille.

— On dirait que tu fuis toujours nos amusements, lui dit-il.