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Page:Fortier - Les mystères de Montréal, 1893.djvu/309

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les mystères de montréal

Environ six mois après j’en vis un qui passait bien loin. Je montai sur le plus haut rocher et je lui fis des signaux. Hélas, ils ne furent pas aperçus. Et au coucher du soleil j’eus la douleur de le voir disparaître complètement. Je rentrai dans ma hutte plus triste qu’auparavant…

Aucun autre navire, excepté le vôtre, ne vint dans ces parages d’où j’en conclus que mon île n’était pas située sur le chemin des vaisseaux qui sillonnent l’Atlantique, et qu’à moins d’un hasard j’y resterais toute ma vie… Par prudence j’allumais chaque nuit un feu sur un rocher et j’interrogeais l’océan pour tâcher de découvrir une autre lumière… Ah, capitaine, quand j’ai vu votre navire comme j’ai tremblé de crainte de n’être pas aperçu. Mais quand je l’ai vu modérer sa course, comme j’ai été content, et avec quelle impatience, j’ai attendu le lever du jour ! Comment pourrais-je vous rendre ce que vous avez fait pour moi !

— Ne parlons pas de cela ; fit le capitaine, je suis aussi content que vous de vous avoir tiré de cette affreuse solitude. Dites-nous seulement, monsieur, ce que vous pensez du Marie-Céleste.

— Je me perds en conjectures et je donnerais dix ans de ma vie pour éclaircir ce mystère. Qu’en a-t-on dit ?

— Bien des choses, allez, mais l’opinion qui a prévalu est celle-ci : qu’il était survenu une panique et que l’équipage s’était jeté à la mer dans une cha-