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le pouce crochu

avoir été sauvée par un joli garçon, avenant et distingué, que de rester l’obligée d’un rustre mal tourné.

À ce moment, elle vit venir un fiacre attardé qui rentrait dans Paris après une course suburbaine ; mais elle ne pouvait pas quitter ainsi un homme qui avait risqué sa vie pour elle et elle lui dit :

— Monsieur, je vais rentrer seule. Ce sera mieux. Mais j’espère vous revoir demain. Je demeure boulevard Voltaire, 292… Mademoiselle Monistrol… et si vous voulez bien faire ce long voyage…

— Vous n’en doutez pas, répliqua vivement le jeune homme. Mais… il me semble que votre nom ne m’est pas inconnu…

— Vous l’avez sans doute lu dans les journaux qui ont parlé de l’assassinat de mon père.

— Quoi ! vous seriez…

— La fille de Jean Monistrol qu’on a tué sous mes yeux et que j’ai juré de venger…

— Oh ! je comprends maintenant pourquoi je vous ai trouvée dans cette plaine sinistre. Vous cherchiez le meurtrier et il vous a échappé… en se débarrassant par un nouveau crime des amis qui vous secondaient. Je les remplacerai et ce misérable ne se défera pas de moi si facilement. Dites un mot, mademoiselle, et j’entre en campagne dès demain. Je retrouverai cette maison, si vous voulez bien me la décrire… j’y pénétrerai et…

— Elle est bâtie en briques rouges… mais… arrêtez, cocher !

— Voilà, bourgeois ! répondit le cocher en retenant son cheval. Dans quel quartier que vous allez ?

— Place du Trône.

— Ça me va. Je remise avenue Parmentier. Montez !