son droit d’appropriation personnelle, il se sent appelé à conquérir les choses indispensables, la nourriture, le vêtement ; le fruit pour le manger, la bête fauve pour se nourrir de sa chair et se couvrir de sa dépouille. Cet instinct de l’homme, ce penchant, ce sentiment profond et immuable, constituent une des preuves les plus solides de la légitimité du droit de propriété.
S’il n’était excité par le sentiment de la propriété, l’homme perdrait toute émulation ; il ne travaillerait qu’autant qu’il le faudrait pour subsister misérablement. Trouver une caverne, cueillir quelques fruits sauvages, épuiser dans la chasse des animaux son adresse et sa force, voilà ce à quoi se borneraient ses efforts. Mais l’homme, tant qu’il ne sortirait point de cet état, n’aurait qu’une vie précaire et misérable ; ses moyens d’existence, qui dépendraient du hasard, lui manqueraient souvent, et il courrait toujours le risque de périr de besoin et de misère. On a dit, il est vrai, que, n’eût-il point l’appropriation personnelle en vue, l’homme travaillerait par sentiment d’honneur ; c’est là une hypothèse fort belle dans un livre, mais tout à fait irréalisable dans le train ordinaire de la vie. Il faut traiter humainement les choses humaines ; on donne sa vie pour ce qu’on appelle l’honneur, mais on ne se voue pas pour lui à la fatigue, aux souffrances, aux soucis de tous les instants. Chez les peuples chasseurs et les chez les peuples pasteurs eux-mêmes, le défaut d’appropriation individuelle et de culture du sol est un obstacle aux progrès de la civilisation. La société ne peut recevoir les développements dont elle est susceptible que par la culture des terres, qui multiplie les produits. La culture exige des soins continuels et la certitude que celui qui a semé récoltera. Il