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Page:Foucart - Éléments de droit public et administratif, 1855.djvu/54

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n’est qu’aux époques de civilisation déjà avancées qu’on voit une nation fonder ou modifier son droit public au moyen de déclarations positives sur lesquelles chaque individu est appelé à manifester sa volonté ; ce fait a eu lieu lors de la fondation de la colonie anglo-américaine, qui a été le germe des États-Unis d’Amérique ; nous l’avons vu se reproduire il y a peu d’années, non pas pour fonder, mais pour modifier le droit public, lorsque le peuple français, appelé à émettre son vote, a aboli par 7, 824, 189 suffrages la forme républicaine, qui lui avait été imposée par une insurrection, a rétabli l’Empire et adopté les principes qui servent de base à la constitution actuelle. Mais l’intervention de tout un peuple est un cas nécessairement exceptionnel ; le plus ordinairement les modifications sont faites par des corps politiques régulièrement organisés, qui prennent au nom de la nation des mesures que celle-ci ratifie formellement ou tacitement.

Toutes les modifications de cette nature, pour être utiles et durables, ne doivent être que la transformation en loi des besoins et des vœux populaires. Il faut d’abord qu’une modification soit faite dans les esprits, pour pouvoir être réalisée dans les faits, que la révolution sociale précède la révolution politique[1]. Quelquefois, à l’action lente mais sûre de l’idée, l’homme substitue celle de la force, voulant dans son impatience intervertir l’ordre naturel des choses, et faire découler les modifications sociales des modifications politiques. Quelquefois aussi une résistance aveugle ou bien des attaques imprudentes soulèvent une tempête qui renverse tous les obstacles, mais ébranle en même temps

  1. Nous prenons ici le mot révolution dans le sens général d’un changement dans les idées et dans la forme politique, et non dans le sens restreint d’un changement subit et violent.