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CHAPITRE X

LES QUATRE PÈLERINAGES SECONDAIRES

Les Écritures canoniques viennent de nous donner un aperçu, que l’on voudrait croire dans l’ensemble fidèle, des faits et gestes du Bouddha au cours de sa longue carrière enseignante et, par la même occasion, elles nous ont retracé un portrait — assurément fait de mémoire et embelli par le regret, mais encore ressemblant — de son attachante personnalité. Elles vont également nous permettre, sinon de relever au jour le jour l’itinéraire de ses pérégrinations incessantes (nous n’en demandons pas tant), du moins d’en délimiter le champ et d’en fixer les principales étapes. Un fait peut déjà être considéré comme acquis : le pays à travers lequel Çâkya-mouni, quelque quarante-cinq années durant, aurait promené son infatigable prédication est la partie centrale du bassin du Gange ; et de ce territoire relativement restreint, bien qu’égal en superficie à la moitié de la France, il n’est jamais sorti. Plus tard, quand sa religion répandue dans toute la péninsule eut conquis à fond et Ceylan et le Gandhâra, il était inévitable que la légende accordât à la dévotion des habitants de ces nouvelles terres saintes la satisfaction de croire que leurs ancêtres avaient jadis reçu la visite du Bienheureux ; et l’on en vint à prêter à celui-ci de miraculeuses tournées jusqu’aux extrémités de l’Inde, tant dans la grande île du Sud que dans les montagnes du Nord-Ouest ; mais ces récits ont tout juste la même valeur que ceux qui font voyager Jésus-Christ en Bretagne[1]. Pour dresser la carte de la région évangélisée par le Maître en personne, il suffit de marquer le site des huit villes qui, consacrées au souvenir de ses huit principaux miracles, sont longtemps restées et sont en train de redevenir le but des huit pèlerinages bouddhiques[2]. Une fois de plus l’excellente mémoire topographique des Indiens n’a pas été trouvée en défaut. L’archéologie aidant, il est possible grâce à elle d’établir de façon certaine le cadre géographique où s’est tout entière déroulée l’activité de Çâkya-mouni.

Les lieux saints. — Reste à savoir comment s’est constituée sur ce point la tradition. Le procédé nous est si familier que nous aurions pu le deviner sans l’assistance des textes ; mais ceux-ci ont tenu à nous l’exposer avec une ingénuité parfaite. Un seul détail réclame à l’avance quelque éclaircissement : que faut-il comprendre ici par « miracle » ? Inconsciemment ou non, les

  1. Cf. J. Przyluski, Le Nord-Ouest de l’Inde dans le Vinaya des Mûla-Sarvâsti-vâdin, JA nov.-déc. 1914 et Mahâvaṃsa ii ou Manual p. 212 s.
  2. V. la carte (fig. 2) ; de Bénarès à chacun des autres sites la distance varie de 200 à 400 kilomètres pour Sânkâçya dont on notera la position excentrique.

    Fig. 2. — Le pays d’origine du Bouddhisme.
    Le nom des huit villes saintes, théâtres des huit grands miracles et buts des huit pèlerinages, sont en petites capitales.