Page:Fougeret de Monbron - Le Canapé couleur de feu.djvu/113

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que le jeune prince son maître prit pour ce page une affection tout extraordinaire. Il devint son mignon, le compagnon de toutes ses promenades et l’unique page de son cabinet.

Bragincour, qui avait un peu d’expérience du monde et qui avait appris l’art de feindre, appréhendant que des faveurs si singulières qu’il recevait de son maître ne l’exposassent trop aux yeux des autres et que la jalousie ne brossât quelque chose contre lui, se ménageait le plus qu’il pouvait dans l’esprit de ses camarades, jusqu’à déclamer contre la dureté du service d’un prince qui semblait ne l’avoir engagé que pour lui ravir sa liberté et le clouer dans un cabinet. Cependant il eut beau faire, il ne put les détromper de la pensée dont ils étaient prévenus, qu’il était uniquement aimé.

Ils ne voyaient que trop les égards que leur gouverneur avait pour Bragincour, parce qu’il était chéri du prince.

En effet, quoique ce page favori fût trouvé enveloppé dans les fautes que commet ordinairement cette sorte de jeunesse, il n’éprouvait point les châtiments dont on réprimait le libertinage des autres.

Ce qui les anima davantage contre lui fut que