Page:Fougeret de Monbron - Le Cosmopolite.djvu/52

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pour ainsi dire, sur la bonne bouche ; car le dégoût est toujours la suite d’un approfondissement trop exact. Voilà l’avantage qu’ont les voyageurs, ils passent d’une liaison à l’autre sans s’attacher à personne ils n’ont ni le temps de remarquer les défauts d’autrui, ni celui de laisser remarquer les leurs ; chacun leur paroît aimable, ainsi qu’ils le paroissent à chacun. Combien de gens dans le monde, qui, faute de m’avoir connu, m’ont honoré de leur estime, & m’accableroient peut-être aujourd’hui des mépris les plus humiliants s’ils avoient eu le loisir de me voir à découvert ! Combien aussi de ces Messieurs, de qui j’ai conçu les idées les plus avantageuses sur quelques dehors brillants, qui n’eussent jamais été que des faquins à mes yeux, si je les avois fréquentés quelques jours de plus. Nous ressemblons assez généralement à de certaines étoffes, dont le premier coup d’œil séduit & flatte la vue, & qui de-