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MATHÉMATIQUE ET MÉCANIQUE UNIVERSELLES.

elle-même est une sorte d’idole qui, malgré Descartes, subsiste encore aujourd’hui dans la physique. Les parties de l’étendue sont en dehors l’une de l’autre et s’excluent mutuellement, voilà qui est certain ; mais, quand nous transportons aux existences cette exclusion mutuelle et absolue, nous ne faisons que nous figurer par l’imagination, sous un symbole plus ou moins grossier, la propriété intelligible qu’ont les parties de l’espace d’être en dehors les unes des autres. Si rien ne nous causait la sensation originale de résistance, d’effort arrêté, nous ne concevrions pas l’impénétrabilité. Scientifiquement celle-ci se résout en deux mouvements de sens contraire qui se font équilibre ; c’est un simple arrêt de mouvement.

Au point de vue de la physique, Descartes a donc raison et ses idées seront de plus en plus confirmées. En dehors du moi et de tous les êtres sentants et agissants, il n’y a rien dans l’univers, pour le physicien, que des relations géométriques ou mécaniques, qui peuvent être soumises au calcul. De là le mot fameux de Descartes : « Donnez-moi l’étendue et le mouvement, je construirai le monde ». Comme la physique proprement dite n’a pas à s’occuper de l’essence des corps, comme elle se borne à l’étude des phénomènes et des lois, on peut dire que Descartes a fondé la physique sur sa base définitive.

II. — Si, en dehors du mental, la matière proprement dite, la matière nue n’est que l’espace, il