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LA PHYSIOLOGIE MÉCANIQUE.

avec l’éloquence géométrique d’un Pascal : « Quelqu’un dira avec dédain qu’il est ridicule d’attribuer un phénomène aussi important que la formation de l’homme à de si petites causes ; mais quelles plus grandes causes faut-il donc que les lois éternelles de la nature ? Veut-on l’intervention immédiate de l’intelligence ? De quelle intelligence ? De Dieu lui-même ? Pourquoi donc naît-il des monstres ? »

Devançant Darwin, Descartes pressent la loi qui veut que les organismes mal conformés disparaissent, tandis que les autres organismes subsistent avec leurs espèces en apparence immuables. « Il n’est pas étonnant, dit-il, que presque tous les animaux engendrent ; car ceux qui ne peuvent engendrer, à leur tour, ne sont plus engendrés, et dès lors ils ne se retrouvent plus dans le monde. » En conséquence, les espèces bien constituées subsistent seules à la fin. Mais il ne faut pas croire pour cela qu’elles aient été les seules productions de la nature, ni les œuvres d’un dessein spécial, pas plus que les formes de la neige ou de la grêle.

Une fois produit mécaniquement, le germe se développe à son tour suivant les règles de la mécanique. « Si on connaissait bien toutes les parties de la semence de quelque espèce d’animal en particulier, par exemple de l’homme, on pourrait déduire de cela seul, par des raisons entièrement mathématiques, toute la figure et conformation de chacun de ses membres ; comme aussi, réciproquement, en connaissant plusieurs particularités de cette confor-