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VALEUR DU SYSTÈME SCIENTIFIQUE DE DESCARTES.

effet, n’est plus propre à susciter les grandes inventions que le retour aux principes dominateurs de la science. Depuis un demi-siècle, dans le pays même de Descartes, les savants l’ont trop oublié. Il en est résulté que les grandes hypothèses et généralisations scientifiques sont venues d’ailleurs, et qu’à force de « positivisme » nous avons laissé stériles les vérités qui étaient déjà dans Descartes. N’est-ce pas à la France qu’il appartenait d’établir la théorie mécanique de la chaleur ? Cette théorie, nous venons de le voir, est en toutes lettres dans Descartes qu’on ne lit pas, et elle n’avait plus besoin que de quelques confirmations expérimentales. Et la théorie de la corrélation des forces vives ? Et celle de l’évolutionnisme ? Elles sont encore dans Descartes. On a dit avec raison que l’esprit français a manqué les plus grandes découvertes de notre siècle faute d’idées philosophiques. Il n’y a pas lieu d’en féliciter Auguste Comte, qui a rétréci et découronné le cartésianisme en même temps que le kantisme. Est-ce en plein xixe siècle qu’il était utile de proclamer la science indépendante de la métaphysique, comme si la métaphysique était aujourd’hui gênante ? Quant à confondre la métaphysique, comme le fait Auguste Comte, avec l’ « explication des choses par des entités », c’est oublier que ce sont précisément les grands métaphysiciens et, plus que les autres, Descartes, qui ont chassé toutes les entités du domaine de la science. N’avons-nous pas vu qu’avant Descartes la science était anthropocentrique, comme