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DESCARTES.

organes qui en contiennent d’autres encore, et ainsi de suite ; dans une masse quelconque de matière il y a une infinité de parties. Descartes reconnaît lui-même que tout est infiniment grand ou infiniment petit selon le point de comparaison, et on sait la conclusion que Pascal en tire : l’homme a beau enfler ses conceptions, il ne peut les égaler à l’ample sein de la nature. S’il en est ainsi, les constructions de notre esprit et les formules de nos raisonnements ne sauraient être assez vastes pour tout embrasser : il faut recourir sans cesse à l’expérience, revenir au contact de la réalité même pour saisir sur le fait les combinaisons nouvelles que nous n’aurions pu prévoir. L’univers, mêlant et démêlant toutes choses, comme il le fait sans cesse, demeurera donc toujours supérieur à la pensée de l’homme. Au reste, Descartes le dit lui-même, on ne peut se passer de l’expérience pour savoir ce qui est réalisé actuellement parmi l’infinité des possibles, pour déterminer où en est la grande partie qui se joue sur l’échiquier de l’univers. Il n’en conçoit pas moins l’espoir d’arriver du moins à connaître la loi fondamentale de la matière, et cette espérance n’est point aussi étrange qu’elle le semble au premier abord. Il n’y a peut-être pas dans la nature, sous le rapport des qualités, cette infinité qu’elle offre sous le rapport des quantités ; la nature n’a peut-être pas un fonds aussi riche que nous le supposons. Ne se répète-t-elle pas elle-même d’une planète à une autre, d’un soleil à un autre, avec une sorte de pau-