Page:Fourier - Sur l'esprit irréligieux des modernes et dernières analogies 1850.djvu/48

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Il serait libre de faire cesser leurs souffrances du moment qu’il n’y prendrait aucun plaisir ; mais en vertu de vos dogmes, elles ne finiront jamais ; jamais Dieu ne sera rassasié ni assouvi de leurs épouvantables tourments. Vils cannibales, qui depuis dix-huit cents ans outragez la divinité par de pareilles calomnies, s’il était vrai qu’elle tirât vengeance des outrages que lui font les hommes, ne devrait-elle pas vous foudroyer à la vue des peuples et dans ces temples mêmes où vous ravalez l’Être Suprême au-dessous des plus odieux bourreaux, et comment un Globe qui a toléré et tolère encore cette dégoûtante calomnie contre la divinité s’étonnerait-il de n’avoir pas pénétré les décrets de Dieu sur les destinées sociales ?

Ineptes civilisés qui parlez de raison et de perfectibilité, pourriez-vous dire quel est le plus absurde de votre enfer ou de votre paradis, de votre législation ou de votre morale, de vos athées ou de vos dévots simulés ?


Ô vous qui avez inventé l’Enfer, anciens prêtres d’Orient, vous avez sans le savoir dit une grande vérité. Oui l’enfer existe. En l’annonçant, vous n’avez fait qu’une erreur de temps et de lieu. L’Enfer, c’est l’état d’un Globe qui ignore le code divin et gémit dans les souffrances engendrées par les lois des hommes ; l’Enfer, c’est la société civilisée, barbare et sauvage qui a vomi sur cette terre malheureuse plus de calamités que les anges de ténèbres n’en auraient jamais inventées.

Et vous, continuateurs de cette infâme doctrine, vous êtes punis par où vous avez péché. La cupidité, l’appât des donations testamentaires vous suggéra le système de l’enfer ; c’est aussi la cupidité qui vous en a ôté le fruit. Dans le début de la révolution, vous refusâtes de contribuer aux charges de l’État, de rendre à César ce qui est à César ; la Civilisation vous a tout ôté, vous êtes tombés dès ce monde dans l’enfer social qui est la pauvreté.

Vous aussi, philosophes, Titans modernes, vous êtes punis par où vous avez péché. La soif de l’or et du pouvoir vous érigea en apôtres de l’athéisme. Dieu qui ne punit les impies qu’en les livrant à eux-mêmes, livra l’Europe et vous aux conséquences de votre inepte doctrine. Vous avez été pris dans les pièges que vous aviez créés : ceux d’entre vous qui ne sont pas montés à l’échafaud sont tombés dans le

    et vibrer convulsivement, sans s’user ni se blaser jamais, dans les étreintes des plus épouvantables supplices. — Sang du Christ ! interrompit avec feu le capitaine Vasco, faire de notre corps un pareil chef-d’œuvre de puissance et d’inaltérabilité pour se donner le plaisir de le torturer plus rudement et mieux à son aise, quelle horreur ! Allons donc ! maître, je suis de votre avis ; il ne se peut pas que Dieu ait fait cela…

    Fortunada,
    par Antony Méray.