thèse vous révolte, vous ne pouvez admettre qu’un seul instant je vous suppose capable de raisonnements pareils.
Mais, malheureux ! comment ne voyez-vous vous pas que vous n’en tenez guère d’autres, précisément, quand vous tentez de nous expliquer comme vous faites le triste état de notre parler national ? Comment ne comprenez-vous pas que tout ce fourmillement de barbarismes, solécismes, anglicismes, etc., en quoi réside pour vous le foyer même du mal, n’en est en réalité que la manifestation ? que ces défauts de notre langage ne sont que les effets, tout superficiels, de causes profondes ? — et qu’enfin ils n’ont, avec le trouble caché qu’ils trahissent, ni plus ni moins de rapport que les sueurs du poitrinaire avec le désordre intérieur dont elles sont le symptôme ?
Symptômes, en effet, que tout cela, mon pauvre docteur, et rien que symptômes. Le mal est ailleurs. Il est en nous. Il est à la racine même de notre être, et l’incorrection de notre langage n’est que l’une de ses manifestations, entre combien d’autres ! Nous en sommes pénétrés tout entiers et de toutes les façons : intellectuellement, moralement, physiquement. Marquant de son signe tous les gestes de notre activité, il déforme à la fois notre démarche et notre pensée, notre langage et notre conscience, no-