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Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome II, 1922.djvu/70

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UNE INTERVIEW DE M. HENRI ROCHEFORT[1]



Paris, le samedi, 30 avril.


Voici l’une des existences à coup sûr les plus dramatiques de notre époque — et de toutes les époques. Depuis cinquante ans, M. Rochefort n’a pas cessé d’être, en France, à aucun moment, le journaliste en vedette. Il a démoli l’Empire, il a jeté bas on ne sait combien de ministères. Se battant en duel trois fois dans la même journée, exilé, condamné à mort, déporté aux bagnes de la Nouvelle-Calédonie, puis s’échappant à la nage, il est un mois plus tard porté en triomphe dans Paris. Il est l’idole de la foule. Il écrit : « Je n’ai qu’un mot à dire pour faire descendre des faubourgs deux cent mille hommes. » Et c’est vrai : il le prouve. Malgré Napoléon III, il se fait élire député à une énorme majorité. À la Commune, il tient Paris et la France entière dans ses mains. — Enfin, voici le pays en république ; M. Rochefort s’arrêtera-t-il ?… Non pas, il poursuit sa marche, plus âpre et plus acharnée que jamais ; autour de lui continuent de s’amonceler les

  1. Publiée dans la Patrie du 24 mai 1910, au cours d’une série de lettres de France.