Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome II, 1922.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
85
UNE VISITE À MISTRAL

Ce fut l’an dernier également que l’Académie française lui offrit, d’elle-même, un siège sous la Coupole. Désireuse de s’honorer en accueillant le chantre de Mireille, l’Illustre Compagnie avait décidé de rompre, en faveur de Mistral, avec des usages séculaires. Pour la première fois depuis trois cents ans, elle aurait dispensé un candidat de la corvée traditionnelle des visites, et d’avance elle lui garantissait l’élection à l’unanimité. Mistral refusa, craignant que ce nouvel honneur ne le contraignît à s’éloigner trop souvent de sa chère Provence, qu’il aime plus que tout au monde.

⁂ Il habite, depuis son enfance, le petit village de Maillanne, à trois heures environ de Marseille. C’est ici même que s’éteignit le père de Mistral, à quelques arpents à peine de la ferme où naquit le poète et où s’écoulèrent ses premiers ans : car Mistral est fils de paysan.

Maillanne est un petit village de deux cents âmes tout au plus, qui forme le centre à peu près de la Commune (nous dirions chez nous : de la paroisse). Villageois ou paysans, Mistral connaît tout le monde dans sa petite patrie. Ayant toujours vécu parmi ces braves gens, il les tutoie presque tous ; et il n’a pas de plus grande joie que de s’entretenir familièrement avec eux — en provençal, cela va sans dire…

Pour aller à Maillanne, de la plus proche station de chemin de fer, il n’y a pas moins de