Aller au contenu

Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome II, 1922.djvu/9

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aux livres de nos cousins de France, mais qui, malgré leurs faiblesses, ne manqueraient ni d’originalité, ni de couleur, ni de charme. Ce serait déjà plus que tout ce que nous avons eu jusqu’ici, car on peut les compter, les productions de nos Canadiens qui ne sont pas que d’insignifiants pastiches, quand elles n’affichent pas la plus profonde absence de tout style et souvent une crasse ignorance de la grammaire.

Mais il faut arroser ce champ des intelligences où l’on entend sourdre et frémir de toute part comme l’effort d’une semence qui germe ; à tous ces talents qui pourraient nous fournir la base de notre littérature à venir, il faut donner quelque chose capable de féconder les grandes choses latentes au fond d’eux-mêmes.


⁂ Ce quelque chose, c’est une vraie critique.


⁂ Il faut quelque chose aussi pour les empêcher de crever de faim pendant qu’ils sueront sur leurs ouvrages.


⁂ Cet autre quelque chose, c’est l’encouragement du public sous forme de quelques prosaïques dollars qu’on échangera contre leurs poétiques élucubrations ou leurs beaux volumes dans la langue de M. Jourdain.


⁂ Mais, à moins de parler au diable, il est difficile de prévoir la naissance de la critique véritable, qui, en donnant aux talents leur consécration, serait pour toutes les nullités une guillotine implacable.